Vade Retro Satanas
Je fais rarement apparaître dans ce blog mes pensées (profondes) sur le fait politique, culturel ou autre.
Mais diantre, quelles inepties lues dans le RSS de Libération (j'avoue que je n'ai déjà pas à la base une affection particulière pour ce "journal") : "Benoît XVI pourrait se faire sonner les cloches", "Flatterie" et surtout "Le Vatican en pleine reconquête intégriste" !
Fait certainement insignifiant pour la plupart d'entre vous (c'est pour ça que j'en parle, c'est quand même blogement plus léger que les foetus au congélo).... mais j'avoue que, pour moi...
J'avoue que je m'intéresse de très près au fait religieux, à la liturgie, à la religion elle-même (ce qui fait régulièrement le désespoir de ma mère)
J'avoue que j'ai une tendresse particulière pour la messe en latin.
J'avoue que les rares fois où je vais à la messe, c'est à saint Nicolas.
Mais ce qui est vaut ce "GRRRRR", ce n'est pas tant que Libération critique de façon assez virulente un événement qui me tient à coeur, c'est plutôt la malhonnêteté intellectuelle, le néant de la réflexion qui accompagnent ces articles.
L'utilisation du terme "intégriste" est en elle-même justifiable si elle est employée en son sens propre. On est en effet strictement intégriste quand on refuse Vatican II, "modernisation" de la liturgie catholique. Mais dans l'esprit français actuel, d'intégrisme (doctrine catholique du XIXe) au fanatisme, il n'y a qu'un pas. Par un jeu de connotation, le ton est déjà donné. Surtout quand, dans le corps de l'article "Le Vatican...", on rapproche les catholiques traditionalistes de l'extrême-droite : de l'intégrisme au fascisme, le pas est franchi. Il y a certes des membres du F.N ou autres assimilés chez les traditionalistes, mais il y en a surtout en dehors ; et la cohérence des valeurs catholiques, même et surtout traditionnelles, avec celles de l'extrême-droite est assez problématique et complexe.
Ce n'est pas grave, faisons l'amalgame...
D'autant plus que les raisons du refus de la messe selon Vatican II ne sont absolument pas expliquées, ne serait-ce que mentionnées. De malheureux obscurantistes, voilà tout.
Mais non, préférer la messe en latin, c'est le fruit d'une réflexion. D'accord, la tendresse particulière que j'ai pour cette langue ne me semble pas être un argument d'une objectivité sans faille. Simplement, la messe n'a pas à être moderne, je pense : elle est lien avec l'immémorial et même avec l'éternel. Parce que le latin est aussi la langue de la Chrétienté.
Mais surtout, la messe de saint Pie V implique un autre rituel bien plus en accord avec le texte. Deux exemples simplement :
- depuis Vatican II, le prêtre fait face aux ouailles (communication niania). Dans la messe de saint Pie V, il leur fait dos, ce qui se comprend aisément si on le rapproche du berger qui doit conduire son troupeau.
- de même, la modification, et même la suppression de l'offertoire, qui contredit toutes les règles du sentire cum liturgia.
Je ne vais pas vous faire un exposé pro et contra, je remarque simplement que les articles de Libé sont construits sur un parti-pris (encore acceptable puisque évident) mais surtout sont étonnamment creux, vides de toutes réflexion. Un minimum de recherche, de réflexion relèverait non seulement de leur travail de journaliste mais surtout de leur position de polémiste (qu'on critique la messe de saint Pie V, d'accord, mais en fondant sa prise de position sur des arguments, théologiques, plus conséquents de "traditionalistes = souvent extrême-droite").
Mais le Pape Benoît XVI passe pour un indécrottable fanatique : considérer le discours de Ratisbonne comme anti-progressiste prouve une fois encore qu'un examen précis du texte n'a pas été effectué...
M'enfin...
Pour ceux que ça intéresse, je mentionnerai juste le livre de l'abbé Claude Barthe, Le Ciel sur la Terre, Essai sur l'essence de la liturgie, qui explique, d'une manière à la fois érudite et très élégante, la nécessité, ou tout du moins justifie, la messe selon saint Pie V.
Et juste : il est piquant que deux articles plus loin de ceux consacrés à Benoît XVI et ses traditionalistes, on trouve ceci :).
Sur ce,